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Mon enfant passe trop de temps devant l’écran

Mise à jour le 14 avril 2022

Votre situation

Votre enfant passe des heures devant son ordinateur, sa tablette ou son téléphone ? En oublie de venir manger, de faire ses devoirs ou de se coucher ? Ses week-ends entiers sont réservés aux jeux en ligne, il ne voit pas ses amis et ne pratique plus d’activités ? Vous aimeriez savoir si son comportement vis-à-vis des écrans est « normal » ou si vous devez intervenir ?

Les jeunes passent beaucoup de temps devant l’écran, plusieurs heures par jour en moyenne. Ces habitudes sont très courantes, et les heures passées devant l’écran augmentent généralement avec l’âge. Mais comment distinguer le comportement sain de la cyberdépendance ?

Cette fiche explique ce qu’est exactement la dépendance à Internet et aux jeux vidéo, et donne des pistes pour apprendre à la reconnaître et savoir comment réagir.

La cyberdépendance, c’est quoi ?

On appelle « cyberdépendance » l’usage excessif de jeux vidéo ou d’Internet. « Excessif » ? A partir de quand ? Qu’est-ce que cela représente ? Nous l’expliquerons un peu plus bas dans « Comment reconnaître la cyberdépendance ? ».

Le psychologue Jean-Charles Nayebi distingue plusieurs types de cyberdépendance :

  • la cyberdépendance au sexe
  • la cyberdépendance aux jeux
  • la cyberdépendance aux communications (chat, mails, réseaux sociaux…)
  • la cyberdépendance à la connaissance (une soif d’apprendre continue sur ses passions ou sur Internet).

Les cyberdépendants ont en général entre 12 et 35 ans, sont souvent des garçons, et se tournent plutôt vers les jeux vidéo. Les filles cyberdépendantes, elles, privilégient les réseaux sociaux (vérifier de façon obsessionnelle ce qui a été posté ou commenté…).

La cyberdépendance touche surtout les personnes qui traversent une période difficile, comme l’adolescence par exemple, mais aussi les personnes fragiles, timides, qui manquent de confiance en elles. Pour Jean-Charles Nayebi, « il y a un profil commun à tout cyberdépendant. C’est la prédisposition à la phobie sociale accompagnée d’une angoisse omniprésente ».

Sur le plan physiologique, la cyberdépendance peut entraîner des maux de tête et migraines chroniques, des maux de dos, une sécheresse des yeux, un syndrome du canal carpien (fourmillements, engourdissement puis douleur dans les doigts), une alimentation irrégulière, des repas sautés et de mauvaise qualité, des insomnies ou de modifications dans le cycle du sommeil, une perte de concentration, une négligence de l’hygiène personnelle…

Sans qu’il y ait une véritable addiction, l’excès d’écran peut aussi avoir ces mêmes effets négatifs. Dès lors qu’il y a un impact négatif sur la vie de votre enfant, il est préférable de réagir pour réguler sa consommation.

Pourquoi devient-on cyberdépendant(e) ?

Ce n’est pas le jeu qui rend véritablement dépendant, même si les éditeurs de jeux incitent leurs joueurs à rester connectés, mais plutôt une certaine fragilité chez l’enfant.

Le jeu peut devenir un refuge, un endroit qui rassure, notamment chez les personnes qui ont le sentiment de ne pas avoir de contrôle de ce qui leur arrive. Par exemple, un collégien qui, malgré ses révisions sérieuses, a une mauvaise note à un examen, ou un enfant dont les parents sont en train de divorcer. Être dépendant au jeu s’explique parfois par la volonté de réussir là où l’on a failli ou pense faillir dans la vraie vie.

Internet peut également être un outil de procrastination ou d’évitement des obligations quotidiennes (les devoirs, le ménage…) qui sont perçues comme angoissantes, stressantes ou ennuyeuses.

Parfois, le fait d’échanger sur Internet dissimule des difficultés ou des handicaps personnels, une difficulté à entrer ou être en relation avec les autres dans la « vraie vie », une faible estime de soi… L’avatar (le personnage incarné virtuellement dans le jeu) peut également être une source de valorisation pour l’enfant, et encore plus s’il est admiré pour ses performances dans le réseau de joueurs où il évolue. L’avatar peut parfois même devenir le plus célèbre de ce monde virtuel.

Plusieurs facteurs peuvent faciliter la dépendance, notamment chez les joueurs de jeux en ligne type MMORPG (les « jeux de rôle massivement multi-joueurs », comme World of Warcraft, Guild Wars, Dofus…), comme l’explique l’ACLEEA :

  • L’univers persistant, permanent et infini : certains jeux n’ont pas de fin, évoluent sans cesse et fonctionnent même quand le joueur n’est pas connecté.
  • La certitude : le joueur est certain d’être récompensé pour le temps qu’il aura passé dans le jeu, contrairement à la vraie vie qui est faite d’incertitudes.
  • L’immersion : le réalisme du jeu et l’anonymat facilite la désinhibition du joueur qui a le sentiment d’exister dans le virtuel.
  • La communauté : le joueur a le sentiment d’appartenir à un groupe (dans le jeu), qui lui offre une forme de reconnaissance.

Comment reconnaître la cyberdépendance ?

Il est important de rappeler que tous les jeunes qui jouent aux jeux vidéo, même pendant de longues heures, ne sont pas forcément dépendants. Et que, quelles que soient leurs pratiques, le jeu vidéo reste une source de plaisir et de créativité.

Cet « antistress » permet de développer des compétences et des qualités : travail d’équipe, coopération, capacité à résoudre des problèmes, empathie, capacités visuelles… quant aux liens possibles entre les jeux vidéo et la violence, ils n’ont jamais été démontrés, certains chercheurs parlent même d’un effet cathartique : le jeu permettrait de se libérer de son agressivité.

Les jeux et la communication via Internet peuvent également aider certaines personnes à pallier des difficultés relationnelles, s’affirmer, créer des liens d’appartenance, expérimenter la solidarité, la reconnaissance sociale… alors que cela leur est plus difficile dans la vie réelle, parfois parce que le corps est impliqué, ce qui n’est pas le cas dans le virtuel.

Pas besoin de s’inquiéter forcément si votre enfant passe beaucoup de temps sur les réseaux sociaux. Tout comme nous passions à l’époque du temps au téléphone, les jeunes d’aujourd’hui utilisent ces nouveaux moyens pour rester en contact avec leurs amis, préparer des sorties, publier des photos… et même parler de leurs devoirs ! A l’adolescence, la reconnaissance et la valorisation sont importantes, et c’est ce que permettent les réseaux sociaux.

Pour reconnaître la cyberdépendance, le premier critère qui nous met la puce à l’oreille est bien évidement le temps passé devant l’écran. Mais se baser uniquement là-dessus ne suffit pas. D’autant qu’aujourd’hui, l’omniprésence d’Internet dans plusieurs sphères de nos vies (nos relations sociales, notre shopping, nos recherches d’information…) rend difficile d’établir un « seuil normal d’utilisation ».

Un enfant qui présente une cyberdépendance va avoir tendance à se replier sur lui-même, à abandonner ses autres loisirs, ses activités sportives, négliger ses amis, ses devoirs… Il est dans un processus de désocialisation. Selon le psychiatre Serge Tisseron, l’usage devient problématique quand “on cesse de jouer pour le plaisir, et qu’on joue pour lutter contre un déplaisir”.

Voici une liste de critères, explicités par le Centre Dollard-Cormier dans son rapport sur la cyberdépendance, qui peuvent être utiles pour déterminer si votre enfant est cyberdépendant(e) :

  1. Votre enfant pense régulièrement aux jeux vidéos ou à ses activités sur Internet, anticipe les prochaines connexions.
  2. Votre enfant désire se contrôler, se limiter ou arrêter mais n’y arrive pas.
  3. Votre enfant est agité(e), irrité(e), a un sentiment de vide lorsqu’il/elle essaie de réduire ou d’arrêter les jeux vidéos ou ses activités sur Internet.
  4. Votre enfant utilise les jeux vidéos ou Internet plus longtemps que prévu, même lorsqu’une autre activité est programmée ensuite.
  5. Votre enfant met en danger sa scolarité, abandonne un loisir, a fragilisé ou a perdu une relation affective importante ou une amitié… à cause de son utilisation des jeux vidéos ou d’Internet.
  6. Votre enfant sait que les jeux vidéos ou Internet a créé ou amplifié certaines difficultés dans sa vie mais continue son utilisation excessive.
  7. Votre enfant ment aux personnes qui l’entourent (famille, amis, thérapeute…) pour ne pas montrer à quel point il/elle est dépendant(e).
  8. Votre enfant utilise Internet afin d’échapper aux difficultés ou soulager sa tristesse, son insatisfaction, son anxiété, sa dépression…
  9. Votre enfant passe un temps démesuré devant son écran (ce critère à lui seul ne suffit pas à déterminer une situation de cyberdépendance).
  10. Les jeux vidéos ou Internet est utilisé pour pallier des difficultés à entrer en relation avec les autres. Il est important de se poser la question : « est-ce que les jeux vidéos ou Internet est la cause de son isolement ou la conséquence ou un refuge temporaire pour éviter de penser aux difficultés présentes dans sa vie ? ».
  11. La perception que l’enfant a de lui-même est déformée par les jeux vidéo et des problèmes psychosociaux se développent (plus de rapports avec les autres dans la vraie vie…).
  12. Le rapport à la réalité est difficile : même si les joueurs ne confondent pas le jeu et la réalité, y compris chez les plus dépendants, certains jeunes peuvent trouver difficile d’accepter les contraintes de la vie réelle (études, travail, amour, amitié…), considèrent qu’elle génère des soucis alors que le jeu, lui, est stimulant.

Que faire face à cette addiction ?

Contacter le 3018.

Le 3018, dispositif national contre les violences numériques est compétent pour accompagner les parents dans leur rôle d’éducation aux usages du numérique par l’enfant. Accessible soit par téléphone, soit par tchat en direct sur 3018.fr via Messenger ou WhatsApp, ce service gratuit, anonyme et confidentiel est disponible du lundi au samedi, de 9h à 20h. Son équipe de professionnels, constitué notamment de psychologues et de spécialistes des outils numériques se tient disponible répondre à toutes vos questions et vous conseiller.

Parler avec l’enfant.

Évitez les phrases culpabilisantes et humiliantes (« tu ne sais faire que ça… », « pour faire ses devoirs y a personne mais pour flemmarder sur l’ordinateur, y a du monde… ! »), demandez-lui ce qu’il lui plaît dans ses jeux, dites-lui que vous vous inquiétez quant à sa pratique et demandez-lui si quelque chose le tracasse, si ça ne se passe pas bien à l’école, s’il/elle se sent seul(e)… La plupart du temps, l’enfant est dépendant(e) car il/elle cherche à fuir quelque chose qui l’angoisse. Le problème à résoudre n’est pas tant l’usage d’Internet que la raison pour laquelle il/elle s’y est réfugié(e).

Quand l’addiction de l’enfant est si forte qu’elle génère des tensions dans la famille, on peut se retrouver face à un cercle vicieux : le contact des parents est persécutant et anxiogène, donc l’adolescent(e) cherche à éviter ce regard parental et se réfugie devant son écran, ce qui crispe d’autant plus la famille. Rompez ce cercle en discutant.

Prendre des mesures avec votre enfant.

Serge Tisseron, psychiatre et spécialiste de des relations qu’ont les jeunes avec les médias, donne 4 conseils :
limiter le temps d’écran en fixant des temps de connexion, ou une « banque de temps », et les faire respecter. Ça ne sert à rien d’interdire totalement l’accès aux vidéos ou à Internet car cela serait le marginaliser vis-à-vis des autres en le privant d’un mode de communication ;
1. limiter le temps d’écran en fixant des temps de connexion, ou une « banque de temps », et les faire respecter. Ça ne sert à rien d’interdire totalement l’accès aux vidéos ou à Internet car cela serait le marginaliser vis-à-vis des autres en le privant d’un mode de communication ;
2. parler à votre enfant de ce qu’il/elle fait ou voit derrière l’écran pour développer son intelligence narrative ;
3. choisir les programmes et les jeux avec votre enfant ;
4. encourager les activités de création sur écran comme le dessin ou la photo.

Le temps d’accès aux écrans accordé à votre enfant dépendra de son âge ou des circonstances (semaine d’école ou week-end).

Δ Attention à ne pas formuler des demandes qui ne pourront pas être respectées et qui généreront de la frustration : il vaut mieux demander à son enfant d’arrêter à la fin d’une partie qu’en plein milieu. Que diriez-vous si l’on vous demandait d’arrêter un film que vous regardez pendant un grand moment de suspense ?

L’impliquer dans ces mesures.

Donnez à votre enfant un petit carnet, dès l’âge de 9 ans, pour qu’il/elle puisse y écrire ses temps de connexion. Les écrans font perdre la notion de temps, il est donc important de la réintroduire pour que votre enfant puisse évaluer sa consommation et ainsi développer le contrôle de lui/elle-même et son autonomie. Si votre enfant oublie de noter quelquefois, ce n’est pas grave, l’important est surtout la prise de conscience.

Vous intéresser à ce que fait votre enfant.

Il est très valorisant pour un enfant de savoir que ses parents s’intéressent à ses activités et sont fiers de ce qu’il fait. Les parents ont parfois d’autant plus de mal à distinguer la pratique saine de l’addiction qu’ils ne connaissent pas suffisamment l’univers d’Internet ou des jeux vidéo. Essayez d’en apprendre plus sur les pratiques de votre enfant, sur les codes et le vocabulaire utilisé, pour recréer du lien et du dialogue dans la famille.

S’assurer que votre enfant connaît les dangers en ligne.

Ne pas donner son vrai nom ou son adresse, ne pas répondre aux messages étranges… mais aussi bien choisir son jeu (le sigle PEGI qui apparaît sur la boîte indique-t-il que le jeu est adapté pour son âge ?). Vous trouverez plein de ressources pour expliquer ces règles à votre enfant sur Educnum ou Internet sans crainte (notamment les vidéos de Vinz et Lou).

Lui proposer d’autres activités.

N’hésitez pas à lui faire essayer de nouvelles choses, pour créer du lien avec votre enfant et l’amener progressivement à se resocialiser.

Pas d'écran dans la chambre.

Il est recommandé de ne pas introduire l’ordinateur dans la chambre avant l’âge de 15 ans, afin de partager des choses avec l’enfant le plus longtemps possible. De préférence, ne choisissez pas de connexion Internet dans le forfait mobile de votre enfant. Sinon, et si votre enfant peut tout de même se connecter au réseau WIFI de la maison, récupérez son téléphone le soir et rendez-le lui le lendemain matin.

Montrez l’exemple.

Si vous dites à votre enfant de modérer sa consommation d’Internet et de jeux vidéo, faites de même ! Les enfants reproduisent souvent ce que les adultes font, nous sommes leurs premiers modèles.

La prise en charge thérapeutique.

a cyberdépendance sérieuse peut être traitée grâce à une psychothérapie comportementale familiale et parfois individuelle. Vous pouvez vous adresser à un psychologue ou pédopsychiatre, ou vous diriger vers la Maison des Adolescents proche de chez vous (consulter le site), qui dispose des consultations psychologiques gratuites. Il existe également des structures spécialisées dans les dépendances aux jeux vidéo (vous les trouverez sur cet annuaire) ou dans les dépendances en général (vous les trouverez sur cet annuaire).

La règle des 3-6-9-12

Le psychiatre Serge Tisseron recommande cette règle simple pour introduire les écrans au bon moment dans la vie de nos enfants :
  • Avant 3 ans : jouez, parlez, arrêtez la télé
  • Entre 3 et 6 ans : limitez les écrans, partagez-les, parlez-en en famille
  • Entre 6 et 9 ans : créez avec les écrans, expliquez-lui Internet
  • De 9 ans à 12 ans : apprenez-lui à se protéger et à protéger ses échanges
  • Après 12 ans : restez disponibles, il a encore besoin de vous !

Je travaille au contact des enfants

Vous êtes enseignant(e) ? Animateur(trice) ? Vous souhaitez faire de la prévention sur la cyberdépendance ?

N’hésitez pas à faire appel à une association spécialisée, comme e-Enfance ou Génération Numérique, qui peut intervenir auprès d’enfants.

Cette réponse a été rédigée par l’équipe de la Fondation pour l’Enfance, en s’appuyant notamment sur les documents « Les règles du jeu… information et prévention sur l’usage des jeux vidéo à la maison » de l’ACLEEA, « La cyberdépendance, état des connaissances, manifestations et pistes d’intervention » du Centre Dollard-Cormier – institut universitaire sur les dépendances, et « Addictions sans substance » de la Fédération Addiction. L’association e-Enfance a aimablement contribué à cette réponse en faisant part de son expertise sur le sujet.